1.10.2023

Nicolas Delarbre, Au vrac qui vacille et Je message ici


Paru en 2022 aux éditions Tarmac. Un recueil en deux parties qui, bien que différentes, s'accordent dans le style et dans le fond. La vie, ici, dans le texte de Nicolas Delarbre, cogne avec violence aussi bien contre le corps que contre la langue. La poésie y fait irruption.





J'enfile les positions comme les suppositoires
Comme un immense collier sans support transitoire
Je suppose dépose et impose sans pauses
Je méfie défie fissa
Doute et redoute la fiabilité de mes bras

Ça tend à rien
S'attend à tout
Suffirait d'un presque bond
Et pourtant ça ne suffira pas

C'es un amas qui ne dit pas sa forme
Un tas en blouse qui prend l'apparence du geste
Un mirage pas sage qui crie sa vaine présence à qui veut  bien le croire

Je guenille en trilles les espaces en vide
J'aplatis pour mieux bondir et je me tais
Enfin de non-recevoir


Ce qui frappe tout de suite à la lecture c'est bien sûr le travail de cette langue. Un travail rythmique comme syntaxique qui se traduit par une utilisation intensive d'anaphores, de jeux de sonorités, de jeux de mots, et parfois par l'utilisation de rimes à distance dont on ne peut s'empêcher de penser qu'elles sont volontaires. Ces éléments, et d'autres, rapprochent ce texte du slam. Les images fusent et se transforment d'un vers à l'autre.


Il y a des vérités démises
Des mesures qui se taisent
Des démons qui t'aspergent
Et le passage de nuages révolutionnaires

Il y a des faux qui mordent
Des quantités qui te définissent
Des bisques qui te ragent
Et le vent qui propage les orages

Il existe des rugissements de gorges plaines
Des éboulements qui te libèrent
Des flaques qui te creusent à mal 
Et le soleil qui a annonce un jour

Il y a des fuites qu'on sonne
Des glas qui sourdissent
Des espaces qui sautent
Et les pousses du printemps qui dénoncent l'attente incongrue


L'écriture de Nicolas Delarbre, par ses oublis de mots, ses juxtapositions déroutantes, et bien d'autres choses, cherche à perturber, à frapper, à éclater. Comment autrement traduire la sensation du vivre que par le direct de la langue, la révolte ?
Quand on lit ce recueil, on a l'impression que chaque vers est la première phrase qui vient à l'esprit. Tout y est immédiat, intense et percutant.


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