2.13.2021

 Michel Talon, Dans les agates


Paru en juillet 2020 aux éditions Le Citron Gare, ce texte nous propose des poèmes façonnés avec précision et dont l'éclat final révèle une richesse intrinsèque à la poésie. L'agate est "une variété de calcédoine qui se caractérise par des dépôts successifs de couleurs ou de tons différents" (Wikipédia). Une définition qui permet d'appréhender la composition des poèmes de Michel Talon. Composition que la couverture du recueil (collage de l'auteur) illustre parfaitement.





MIRACULÉ

Je me détache du soleil
pour en découdre avec l'ombre
- celle de la rue.
Tu sais, le café qui fume 
la pilote en s'excusant.

Une autre la prend en chasse.
Son chapeau tombe
et revendique son droit d'accès.

Les vieilles pierres des maisons se grattent.
La porte ouvragée
ressemble à un animal des forêts.
Horizons incertains, en perte de vitesse.
Un chat de gouttière sort du bois.

Les magnolias de la gare
rassurent sur l'heure creuse
d'un train en difficulté.
Il partira, c'est sûr !

Vœu : que ma dernière bière
soit la meilleure. Flanquée d'ailes.
La mort s'invite sans être cruelle.
Personne pour la photo.

L'arbre a chassé l'oiseau
dans un ultime effort.
Son chant est un silence subtil.

On note, tout de suite, le travail du rythme. Dans ces poèmes, les pensées et les images fusent d'un vers et d'une strophe à l'autre. Il y a comme des ellipses que le lecteur enjambe, tenu, tout de même, par la main du rythme. Une écriture qui fait penser à la libre association d'idées surréaliste. Mais pas que. Ces pensées et ces images on les suit comme des actions. Il y a un fil conducteur qui nous tient fermement : la focalisation. C'est à travers le regard de ce "je" que l'agate se façonne, image par image qui se superposent, et nous offre cet éclat où miroitent les profondeurs qu'elle recèle. 


VIE IMPROVISÉE

Je suis ailleurs
au moment où je te parle.
On se rencontre
dans les hôtels à nostalgie.
Les araignées ont tissé
des vitraux pour le vent.

Une porte close
grossit les rêves.
La marche à suivre attend.
À l'heure dite, le brouillard prend la pose.
Dans la ligne de mire
un nuage au bord du lit.
Les badauds ont des paillettes
sur la piste de danse.
Un chapeau à large bord les trimballe.
Baudelaire en reluque les démons.

J'entre dans ce monde
aux breloques habitées
de châtaignes
en rangs serrés sur la table :
elles ont mal tourné.

On a tous l'histoire 
qu'on ne raconte pas.

Sous les galets faits main
la plage se protège
du faux pas des nuages,
des pelouses cruelles.

De ce rythme, il se dégage une énergie et une vitalité qui viennent équilibrer des thèmes parfois sombres. Dans la même idée, on relève aussi de très nombreuses personnifications. La rue "calme le jeu", les grilles du Luxembourg "fouillent dans ma mémoire" ou le ciel "installe son terrain vague". Ce rythme et ces personnifications proposent des textes animés et peuplés.  

Dans les poèmes de Michel Talon, tout est vivant. 


REVUE

Des cheveux gras après minuit.
Tu me dis - peut-être -.
La maison est éclaboussée d'espoir.
Contre la peur de vivre, l'aura du chat.
Ses poches dans les étoiles.
Au bord de l'eau, il fait bon.
Je voudrais une âme qui ne s'affole pas
comme un étang de pierres précieuses. La faim en fleurs...
L'angoisse au panier quand le sommeil radote.
Café noir, système d. On passe du malheur à la joie.
Tes mots tâtent la cire.
Petits sourires aux draps blancs.
Revue de détail : quand je dors.
Je suis vivant, classé. L'altitude me donne des couleurs.



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2.02.2021

 Samuel Martin-Boche, La ballade de Ridgeway Street #2


Après (Le départ) voici (Arrivée).

Voici ma seconde lecture de ce Polder 186, édité par Gros Textes en collaboration avec la revue Décharge. Poème qui s'intitule (Arrivée). D'autres lectures de ce recueil suivront. Bon voyage.









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